Les tenues athleisure sportives et décontractées ont eu le vent en poupe en 2020. En attestent les succès de l'américain Nike et de son voisin canadien Lululemon. En décembre, ils ont tous les deux annoncé un trimestre fiscal en forte hausse. John Donahoe, le nouveau dirigeant du groupe Nike, a ainsi pu présenter un chiffre d'affaires en hausse de 9% pour le deuxième trimestre. De son côté, Calvin Mc Donald, le numéro un de Lululemon, a fait état d’une progression de 22% au troisième trimestre "Des chiffres étourdissants", s'est exclamé Neil Saunders, l'analyste de Global Data Retail.
Les grands du sport se sont rapidement adaptés aux demandes des consommateurs, confinés à domicile. Les clients ont troqué leurs vêtements de bureau contre des tenues décontractées. "Ils s'intéressent au sport, à leur santé et leur bien-être", a résumé Matthew Friend, le directeur financier de Nike, lors de la présentation des six premiers mois de l'année fiscale devant les analystes de Wall Street. Nike a répondu à leurs attentes. Malgré les fermetures de commerces, le groupe de Beaverton a vu son chiffre d'affaires progresser de 4%, à 17,9 milliards d'€, lors du premier semestre clos le 30 novembre.
Explosion digitale
Quand la clientèle s'est refugiée sur Internet, Nike l’a suivie avec ses applications et ses conseils personnalisés. Le groupe, souligne l'expert en marketing digital SEMrush, reçoit en moyenne 147 millions de visites d'internautes par mois, ce qui en fait le numéro un des sites d'e-commerce de mode. Nike a ainsi vu ses ventes en ligne bondir de 80% au cours des trois derniers mois. Elles représentent aujourd'hui plus de 30% de son activité et devraient dépasser les 50% dans "un avenir proche". Un seul exemple illustre l'appétit des internautes pour la marque. Quand les Chinois ont fêté le jour des célibataires, le plus gros événement virtuel de l'année, les ventes de Nike ont dépassé les 400 millions d'€ sur le site TMall. Depuis le début de la pandémie, Nike a resserré les liens avec ses adhérents en ligne, en leur proposant des exclusivités, un accès privilégié aux nouvelles collections ou de précieux conseils. C'est ainsi que 70 millions de nouveaux membres l’ont rejoint ces derniers mois.
Athlètes amateurs
Difficile de mieux faire. Pourtant Lululemon n’a pas à rougir de la comparaison. Le canadien, qui a popularisé les pantalons de yoga, a réalisé sur neuf mois un chiffre d'affaires de 2,19 milliards d'€, en hausse de 3,5%. Pour son dernier trimestre, clos le 1er novembre, ses activités se sont accélérées. Boostées par l’e-commerce et la réouverture des enseignes Lululemon, ses ventes ont crû de 22%, à 900 millions d'€. Le groupe marque son territoire sur Internet avec des classes de yoga et autres exercices. Les ventes digitales et en magasins représentent aujourd'hui 43% de l'ensemble.
Ce qui n'est guère surprenant lorsque l'on regarde les articles de mode les plus demandés sur SEMrush. Les pantalons de survêtements y sont en hausse de 119% et les pantalons de jogging progressent de 73%. La montée en puissance des vêtements sportifs est telle que le groupe d'investissement espagnol Comprar Acciones estime que le marché mondial, qui a atteint les 290 milliards d'€ en 2020, pourrait dépasser les 360 milliards d'€ en 2026. Les experts de Comprar Acciones tablent sur une progression durable de la tendance athlétique décontractée, bénéfique pour Nike et ses concurrents Adidas, Puma, Athleta. D'ores et déjà, 31% des ventes d'habillement aux Etats Unis pour les fêtes de fin d'année relèvent de la catégorie sportive. Ce montant s’élevait à 26% en 2019. Entretemps, l'épidémie est passée par là et les amateurs de confort et d'exercices physiques se sont imposés en première ligne.
Caroline Talbot à New York
Article du 5 janvier 2021