«Nous sommes les victimes expiatoires de la lutte contre le covid. Il en fallait une. Aucun cluster n’a pourtant été constaté chez nous. Nous sommes citoyens, donc nous avons obtempéré. Maintenant, ce que nous attendons de l’Etat, c’est qu’il règle rapidement la question des aides, car il y a urgence.» Gontran Thüring, le délégué général du Cncc (Conseil national des centres commerciaux) est déterminé. Tout comme le sont les gérants des plus de 400 centres commerciaux, réunissant entre 25 et 30.000 commerces, concernés par la fermeture administrative annoncée le 29 janvier. Sans oublier, les grands magasins, déjà affaiblis et obligés de fermer leurs bateaux amiraux ainsi que leurs unités plus petites situées dans des galeries marchandes, tels les Galerie Lafayette de Carré Sénart et Beaugrenelle, le Printemps des Terrasses du Port à Marseille, etc.
La promesse, faite dès le lendemain, d’un fonds de solidarité renforcé, d’une couverture à 70% des charges fixes pour les grandes enseignes intégrées, de la prise en charge à 100% du chômage partiel et de l’exonération des cotisations patronales, ainsi que l’aide au paiement des cotisations salariales, n’a pas calmé les esprits. D’autant que la liste est incomplète. «Il n’y a aucune mesure de compensation pour les bailleurs exclus du fonds de solidarité», relève la Sgm (Société des grands magasins) dont la moitié du parc est concerné. Lors des réunions de travail avec Bercy, tous attendent une concrétisation rapide et massive, avec des aides «simples, rapides et qui couvrent 100% des besoins».
Quatrième mois de fermeture
Dans une ultime tentative d’éviter un troisième confinement, le gouvernement a donc choisi, à la surprise générale, de fermer, les derniers lieux de brassage de population encore accessibles, dont font partie les «bâtiments de plus de 20.000 m2 cumulés, reliés par des allées closes et couvertes», selon une définition fournie par le ministère de l’Economie. Cette mesure effective depuis le lundi 1er février, à mi-parcours des soldes, ne fait pas l’unanimité. «Nous entrons dans un quatrième mois de fermeture», commentent, las, les commerçants. D’autant qu’aucune échéance ne se profile. Un temps annoncé pour un mois par Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, sa durée n’a finalement pas été précisée dans le décret. «Et si jamais l’Etat trouvait que cette décision devait perdurer comme c’est le cas pour les restaurants ?», s’inquiète un commerçant.
Parce que la méthode de calcul inclut les surfaces dites utiles, comme les réserves, et que l’arrêt concerne toutes les formes de commerces, même ceux qui permettaient de se débrouiller, cette décision est souvent jugée comme injuste. Ainsi pour les commerces situés dans des petites galeries obligés de fermer et privés de click & retrait alors que les supermarchés auxquels ils sont adossés (et qui ont la plus grande surface) continuent leur activité. Elle n’a pas été sans quelques couacs, non plus, comme avec la fermeture de Polygone Béziers et de l’Odysseum à Montpellier, alors que le gouvernement avait exclu du dispositif «les zones, parcs d’activités et villages de marques où la circulation du public intervient en extérieur». Ils ont finalement pu rouvrir mercredi 3 février, même s’il a fallu, pour le premier, une action auprès du tribunal administratif de Montpellier.
Évidemment, personne ne souhaitait un confinement strict, mais cette solution rend difficile le défi de traverser la crise, pour ceux, petits ou grands, qui doivent à nouveau baisser le rideau. Tous attendent donc des gestes forts et «un plan d’aide ambitieux ».
Stéphanie Athané
Article du 3 février 2021